Déclaration de la FSU 88 au CDEN du 30 novembre 2023

Nous voici réunis pour un premier CDEN de l’année et c’est donc l’occasion en cette fin de premier trimestre de tirer un bilan sur les actions de notre ministre.

Nous ne saurions débuter cette déclaration sans évoquer notre effroi et celui de la communauté éducative toute entière après l’attaque terroriste à la cité scolaire Léon Gambetta d’Arras. Nous ne nous résignerons jamais à ce que l’École devienne une cible et que des professeur·es soient attaqué·es pour avoir fait leur métier. Nous continuerons au contraire à nous battre contre toutes les formes d’extrémisme et de fanatisme en défendant le rôle primordial de l’École dans sa formation à la pensée émancipatrice indispensable pour permettre aux élèves de devenir des citoyens libres et éclairés. Or, pour cela, l’École doit être dotée de tous les moyens nécessaires pour lutter contre les fanatismes : cela ne peut pas reposer seulement sur des personnels toujours moins nombreux·ses, toujours moins reconnu·es, toujours moins considéré·es. Il faut des actes pour assurer la protection, le respect et la valorisation des personnel·les comme de leurs métiers.

Le « pacte enseignant » est la grande nouveauté de cette rentrée 2023. Au vu des adaptations successives annoncées depuis juin dernier, les collègues n’ont pas voulu jouer le jeu de la contractualisation : nous qui sommes attaché·es à un service public d’éducation de qualité nous nous en félicitons. Nous continuons à dénoncer la logique inepte qui le sous-tend, et à affirmer que le remplacement est un acte pédagogique qui ne s’improvise pas. Rappelons les faits statistiques : les fonctionnaires sont moins absents que la moyenne des travailleurs et travailleuses, et les enseignants le sont moins que la moyenne des fonctionnaires. Halte au matraquage médiatique de poncifs éculés, qui ne servent qu’à camoufler l’étendue de la crise de recrutement, sans cesse plus vertigineuse, en témoigne le nombre d’inscriptions aux différents concours cette année.

Depuis septembre, à bas bruit, la formation continue subit elle aussi de nombreuses attaques. Déjà jugée indigente par beaucoup dans un certain nombre de matières dans l’académie, la voilà encore réduite, de plus en plus marginalisée hors temps scolaire (en soirée, le mercredi, pendant les congés scolaires) et de plus en plus dématérialisée sous forme de MOOC à travailler soi-même. Par ailleurs, la part du disciplinaire est sans cesse plus réduite, au profit de formations plus ou moins prescriptives quant à des méthodes dont l’efficacité est parfois douteuse. Les IA-IPR sont pourtant les premiers à reconnaître que les formations permettant une mise à jour des connaissances disciplinaires sont de loin celles qui sont le plus demandées par la profession ; pour l’administration, le concéder demanderait-il de nous reconnaître comme des spécialistes de nos matières, concepteurs et conceptrices de nos enseignements ?

En cette période de grand chamboulement de nos statuts, la politique du ministère concernant la classe exceptionnelle reflète bien la politique du « en même temps » du macronisme : des annonces favorables en vitrine, une réalité inéquitable pour les personnels. En juin 2023, le ministère Pap N’Diaye avait consenti à « fluidifier les déroulements de carrière », par des « promotions facilitées à la hors-classe et classe exceptionnelle » grâce aux demandes répétées des syndicats de la FSU. Le Ministère supprimait la distinction entre les deux voies d’accès à la classe exceptionnelle, dites viviers 1 et 2, à compter de la campagne 2024. En novembre 2023, le ministère a proposé de nouvelles modalités d’élaboration du tableau de promotion à la classe exceptionnelle, modalités qui ont été unanimement rejetées par les organisations syndicales. Tout barème serait supprimé au profit d’un choix discrétionnaire par le chef d’établissement et l’IPR, qui auraient toute latitude pour formuler un avis « Très favorable », « Favorable » ou « Défavorable » au vu des dossiers des collègues promouvables, les lignes directrices de gestion ministérielles ne précisent pas sur quels critères se base cette évaluation, pour laquelle aucun recours n’est prévu. La FSU appelle à se mobiliser pour que la profession ne se laisse pas priver de la perspective d’une classe exceptionnelle pour toutes et tous. Nous sommes déterminés à mettre en échec cette offensive qui cherche à imposer le pouvoir discrétionnaire des hiérarchies locales et à ralentir les carrières pour une grande partie des personnels.

Dans le second degré, lors de l’année 2024, le Conseil Départemental devrait travailler l’évolution de la carte des collèges pour les années à venir. La FSU espère que cela se réalisera en concertation avec une véritable écoute des différents acteurs concernés pour éviter les situations brutales qui ont créé un fort émoi comme au Val d’Ajol. Par ailleurs, on peut se satisfaire, après des demandes réitérées de la FSU, que les épreuves de spécialités au baccalauréat aient été repoussées au mois de juin. Cependant, le compte n’y est pas ! Cela se fait au prix d’un alourdissement des programmes et avec la nécessité de préparer l’écrit de spécialité et le grand oral en parallèle et ce sans temps dédié. La FSU demande que le Ministre entende les enseignants et les élèves mis sous pression par cette situation génératrice d’une angoisse extrêmement préjudiciable pour les conditions d’enseignement. Dans les établissements du second degré, la présentation des budgets dans les conseils d’administration nous a alerté et consterné. On constate que certaines collectivités, comme le Conseil Régional, envisage de fortement réduire les budgets s’il observe un fonds de roulement qu’il juge trop conséquent. Cela se traduit par une limitation des voyages et sorties scolaires à vocation culturelle. Dans certains collèges, sous prétexte d’une augmentation des coûts de l’énergie et du papier, les économies ayant déjà été faites depuis plusieurs années, à dotations constantes, on ne peut que déplorer les injonctions à limiter voyages, sorties, photocopies et autres économies de bout de chandelle… Rappelons ici que certains de nos élèves n’ont pourtant que l’École pour ouvrir leurs horizons géographiques. L’École publique mérite mieux que cela : elle nécessite un investissement massif, qui ne doit pas servir à financer la mise au pas de la jeunesse via le SNU ou la caporalisation des personnel·les via le « pacte ». Elle ne doit pas non plus être le réceptacle d’un enjeu de compétences entre certaines collectivités et l’Etat, ces premières espérant que l’Etat palliera leur désengagement.

La réforme en cours des LP soulève une opposition massive des collègues, relayée par une majorité de syndicats : le choix obligatoire en fin de 2ème trimestre entre une remise à niveau de 6 semaines, (dont les contenus ne sont pas définis) impérative pour accéder au cycle supérieur et 6 semaines de stage (dont la rémunération reste obscure) s’apparente bel et bien à une assignation sociale ! De plus, les élèves vont perdre un total de l’ordre de 200 heures de cours sur toute leur scolarité en lycée. Alors qu’une heure de cours « perdue » lorsqu’un enseignant·e est en formation est un drame médiatique, le sort des élèves de voie professionnelle inquiète beaucoup moins. Comment peut-on encore avoir la naïveté de croire que les élèves, une fois les épreuves de mars passées vont continuer à aller en cours : on connaît les conséquences des épreuves terminales en mars ! C’est pourquoi la FSU appelle les collègues à se mobiliser massivement lors de la journée d’action du 12 décembre.

En ce qui concerne les horaires de la tenue du CDEN, la FSU, si elle comprend les motivations des différents acteurs de cette instance pour des séances en fin de journée, souhaiterait qu’il puisse y avoir une alternance dans les horaires pour que cela n’impacte pas un temps privé déjà difficile à concilier avec le temps professionnel, associatif et syndical.

Malgré les nombreuses sorties de notre Ministre sur le terrain et toutes ses agitations médiatiques force est de constater que les nombreux changements subis par les personnels à cette rentrée ne sont pas les bonnes solutions aux problèmes qu’ils connaissent au quotidien. Un pacte qui est soi-disant un succès mais dont le Ministère se garde fort bien d’annoncer les vrais chiffres, des personnels épuisés, des conditions de travail de plus en plus dégradées et un métier qui n’attire plus personne vu les faibles possibilités d’évolution des rémunérations.

La FSU continuera de lutter contre toute entreprise de démolition de nos statuts, pour des conditions de travail et d’enseignement favorables pour toutes et tous, pour de vraies revalorisations de nos carrières et contre la suppression programmée de 2 700 postes d’enseignants la rentrée 2024.